- Avec toi… on sait jamais.

C’est vrai qu’avec elle, il avait arrêté de chercher à comprendre son comportement. Elle était tellement… étrange que la logique humaine ne fonctionnait pas avec elle. Ou en tout cas, c’est l’impression qu’elle donnait à Na Chun. En même temps, c’était pour cette raison qu’elle le fascinait. Elle n’était pas comme tout le monde. Loin de là. Il avait l’impression qu’en compagnie de Luce, ils étaient en continuelle compétition. Pas des compétitions comme la plupart des gens le pensait… Même plus le genre de compétitions dangereuses pour les personnes les plus tordues de cette Terre. Enfin, décidemment, le jeu que leur proposait la Mairie – si c’était elle – s’annonçait plutôt amusant. Et il aimait ce divertir… avec elle, il allait être servit ! Cela risquait de déménager et de ne pas rester totalement loyal… voir même légal, les connaissant. Toute ces belles promesses lui donnait inconsciemment le sourire. Il suivit même docilement la demoiselle lorsqu’elle s’engouffra dans la forêt. Pour l’instant tout du moins, n’oublions pas que Na Chun est réputé pour être quelqu’un de sauvage. Très sauvage. Autant vous dire qu’il n’aimait pas jouer les gentils chiens-chiens.

Mais apparemment, le petit jeu de la Mairie tourna vite à la mascarade. Il se doutait bien que c’était le cas. Rien que de voir le sceau lui avait hérissé les poils de la nuque. Cela sentait mauvais. Très mauvais. Ils tournaient en rond. Comme de pauvres petites souris dans une mauvaises expériences de scientifiques… S’il seulement il savait. Il grogna. Son instinct lui disait de fuir très loin. Et il n’était pas du genre à contredire son instinct… Mais pour une fois, il allait se retenir. Il avait envie d’en savoir un peu plus sur toute cette histoire… Et il ne pouvait pas fuir devant Lucrézia ! Question de fierté. Mal placée peut-être, mais fierté tout de même. Il allait sûrement s’en mordre les doigts plus tard. Malgré sa curiosité, il avait comme le pressentiment que toute cette histoire allait vite le gonfler.

Si seulement il pouvait se transformer en guépard… il trouverait très vite la sortie de tout ce cirque avec sa rapidité. Mais devant Luce… Oh ! Il savait qu’elle n’ignorait pas sa race, il n’était pas si ignorant que cela. C’est juste qu’il avait l’impression de « perdre » face à elle s’il devait avoir recours à sa forme originelle. Et merde. Tant pis. Il se transforma, ne laissant sous ses pattes qu’un petit tas de vêtements, qu’il ramassa dans sa gueule pour les amener au pied de Luce, dans l’espoir qu’elle comprenne le message et qu’elle s’en occupe pour lui. Il lui jeta un dernier regard avant de renifler l’air et observer les alentours.

Tss… Ils croyaient vraiment pouvoir le berner avec ce stupide subterfuge ? S’il était sous forme humaine, on pourrait voir un sourire moqueur sur ces lèvres. Il prit entre ces dents un morceau du pantalon de Luce et le tira, signe pour qu’elle le suive bien tranquillement. A son tour de jouer les chiens dociles. Il ouvrit la marche, sûr de lui et du chemin qu’il prenait. On ne trompe pas les sens des fauves, Messieurs-dames.

Na Chun n’aimait pas qu’on se foute de lui. Et tout ce jeu était le cas. Il commençait à être agacé par tout ça, sur les nerfs. Un peu comme une bestiole qu’on tente d’attraper et qui se retrouve acculée à un ravin. Il se sentait étouffer. Et il avait horreur de cela. Encore plus si Luce était de la partie. Il savait à quel point elle pouvait le rendre hors de lui… Ouais, il ne l’avouerait jamais mais elle avait un étrange pouvoir sur lui. Même si cela le faisait chier, elle avait plus d’influence sur lui que sa mère adoptive, qui elle avait pourtant désespérément chercher à pouvoir le faire se soumettre. C’était frustrant. Surtout quand cette dernière se permettait de faire des réflexions à haute voix sur les guépards… TSSS ! C’était pourtant grâce à lui qu’il avait réussi à sortir de cette foutue impasse, alors qu’elle exprime au moins de la reconnaissance, l’ingrate ! Il grogna, plus fort qu’à son habitude. S’il pouvait parler en ce moment, il essaierait sûrement de sortir quelque chose qui lui clouerait le bec.

Mais soudainement, il entendit un bruit. Il se figea avant de réaliser que le son venait de derrière lui. Il se retourna en une fraction de secondes… Pour voir Lucrézia suspendue par le pied grâce à une corde… Il avait envie d’éclater de rire. Mais un guépard ne rit pas. Il se contenta de lécher ses babines pour montrer ses dents, signe de moquerie. Si seulement cela pouvait être tous les jours ainsi, ce serait tellement jouissif ! Au moins, ainsi elle se tenait tranquille, non ?

En la voyant ainsi, si faible… si dépendante de lui… Il hésitait vraiment à la libérer de son entrave. D’un côté, elle l’emmerdait vraiment moi ainsi. C’était un peu sa vengeance personnelle pour la phrase de toute à l’heure… Mais en même temps… il aurait certainement besoin d’elle pour un futur obstacle. Il n’était pas complètement débile, il savait que niveau intellectuel, il ne faisait pas le poids face à elle. Lui travaillait sur l’instinct animal et les capacités physique… et elle avec son cerveau. Il ne pouvait pas se permettre que ce petit jeu dure éternellement. Il avait d’autres choses à faire, bien plus importantes. Néanmoins, s’il voulait la détaché… il serait obligé de se retransformer en humain… ce qui voulait dire se montrer nu face à elle. Il grogna – oui, c’était une habitude.

Il grinça des dents. Il allait le lui faire payer, assurez-vous. Il allait lui rappeler autant de fois qu’il le faudrait pour que le fait qu’elle lui en doive une rentre dans sa petite tête. Tss… Il allait lui en faire baver. Il se transforma, pour finir complètement nu sous les yeux de la « charmante » demoiselle. Il attrapa rapidement la corde incriminée de ses mains et tira un grand coup. Tant pis si elle finissait par terre, ce n’était pas son problème. Il profita de sa confusion pour se retransformer. La flemme de se rhabiller pour le moment. Bon, maintenant il pouvait continuer leur chemin, non ?

Il jeta un rapide regard blasé et reprit sa route. Ils allaient le trouver ce foutu œuf !

Tout en continuant son chemin, il pouvait entendre les maugréassions de Lucrézia. Il s’arrêtait donc jamais d’être désagréable ?! Elle, pouvoir se libérer toute seule ? Il demandait à voir car pour l’instant, tous ces mots, c’était justement... que des mots. Et comment voulait-elle qu’il la prévienne lorsqu’il reprenait sa forme humaine ? Avait-elle oublier qu’il n’était doué de parole en guépard ? Si c’était le cas, alors elle devait avoir vraiment la mémoire courte. Mais cela ne l’étonnerait pas trop non plus. C’était d’ELLE qu’il parlait et pas quelqu’un d’autre. Tss. Elle ne faisait que causer, les actes n’arrivaient jamais… en tout cas jusqu’à maintenant. En plus, elle se permettait de lui donner des ordres. Pourquoi il devrait l’écouter, d’abord ? Il la dépassa, par pure fierté et esprit de contradiction. Ouais, c’était gamin mais son orgueil ne pouvait plus supporter être piétiner par cette gonzesse à la langue trop pendue.

Mais… c’est à ce moment-là que la pluie décida de se mêler de leur querelle d’amoureux. Non, pas une simple pluie de printemps qui vous rafraîchit délicatement et agréablement… Mais plutôt une de celle qui rappelle le déluge de l’Arche de Noé dans la Bible… Pas qu’il soit croyant, non, juste qu’il avait un minimum de culture… à cause – ou grâce, tout dépend de votre façon de voir les choses – de sa mère adoptive qui avait désespérément tenté de faire quelque chose de lui. On voit où cela les a mener tous les deux… Elle était un fantôme amer et drogué et lui… un salop.

Enfin… comme tout guépard qui se respectent, il n’était pas un fan de l’eau… Surtout quand celle-ci frappait si lourd qu’elle pourrait presque laisser des bleus. Il ressembla bien vite à un chaton mouillé. Il était pitoyable et il détestait ça. Il fallait trouver un refuge, et vite… Il n’avait pas envie d’attraper la crève. Mais il devait avoué que Lucrézia avait raison toute à l’heure… Les guépards avaient surtout un atout, la vitesse. Et non pas le repérage dans l’espace… Malheureusement pour eux, les arbres n’arrêtaient en rien la pluie. Une fois de plus, il prit les devants et courut un peu dans tous les sens, dans l’espoir de trouver un abri. Au moins, la vitesse pouvait le servir à explorer le plus d’espace en moins de temps possible… et il pouvait se vanter d’avoir une vue supérieure à un simple humain.

Il repéra bien vite une sorte de… grotte ? Il s’y réfugia rapidement. Ah… merde. Luce… Devait-il vraiment aller la chercher ? Après tout, il était pas si loin d’elle… S’il avait été un autre félin, il aurait poussé un rugissement. Mais un guépard ne rugit pas, il feule ou pousse de petits cris ressemblant à ceux d’un oiseau mais… il ne rugit pas. Et il ne voulait pas que cette demoiselle trouve un nouveau prétexte pour se foutre de sa gueule. Il grogna. Bon… même si cela l’emmerdait, il allait chercher la demoiselle en détresse… Encore une fois. N’empêche qu’elle les accumulait, là. Elle allait lui en devoir pas mal.

Il sortit une nouvelle fois de la grotte et renifla son odeur. Il la reconnaîtrait entre toute. Pas par volonté… juste parce qu’elle était restée ancrée en lui. Il la retrouva bien vite et lui grogna pour lui faire signe de sa présence, afin qu’elle le suive. Il ne vérifia même pas si elle le suivait bien… Il s’en foutait un peu. Quoi que… il gardait un rythme lent pour qu’elle arrive à le suivre… L’abri atteint, il se roula très vite en boule dans un coin… Après une course ainsi, les guépards doivent toujours se reposer au moins 15 minutes. Corps faible.

Transis de fatigue pour avoir couru, il commençait à somnoler… Sans compter qu’il détestait être mouillé. Ou tout du moins sous sa forme animale. Les guépards vivent dans la savane… et ce n’est pas vraiment un coin connu pour ses pluies diluviennes. Oui, ces textes ont pour but intime de vous en apprendre plus sur la vie et le quotidien de ces félins si passionnants… D’ailleurs, saviez-vous que contrairement aux chats leurs griffes ne sont pas rétractiles et qu’elles sont beaucoup moins puissantes que celles de ces cousins les lions ou les tigres ? Mais passons, cela a beau être un but secret, cela ne reste pas le sujet principal… Donc, il somnolait lorsque tout à coup un tas d’habits tomba devant ces yeux, le faisait sursauter. C’est bon, il avait compris le message… Il la fixa droit dans les yeux, histoire qu’elle comprenne que cette fois, si elle voulait pas choquer sa petite conscience, elle ferait mieux de détourner les yeux…

Il se secoua rapidement pour tenter d’égoutter le maximum ses poils de guépards et se retransforma. Il mit rapidement ces habits car non, il n’était pas vraiment exhibitionniste. Il avait d’autres passe-temps, désolé de vous décevoir. Ah, c’est vrai qu’il devait avouer que c’était plus agréable ainsi… Enfin, s’avouer à lui-même car il ne dira jamais à haute voix que Lucrézia avait raison, soyons lucide.

Il regarda le pauvre feu que la demoiselle avait fait. C’est pas avec ça qu’ils risquaient de se réchauffer correctement… Tss… Il avait bien une solution bien plus efficace mais il se répugnait à l’utiliser. Oui, c’est bien ce que vous pensez : la chaleur corporelle. Il grogna, pour changer et s’assit le plus loin possible de Lucrézia. Non, il ne voulait pas arriver à cet extrême. Ils avaient qu’à crever de froid s’il le fallait, sa fierté n’était pas prête à accepter un tel… rapprochement. Mais… merde. Il avait froid. Il n’était pas vraiment le type de gars qui se baladait en t-shirt en plein hiver… Non, lui, c’est plutôt le genre à garder une veste jusqu’à juillet pour être sûr de ne pas avoir froid. Ouais, ce n’était pas classe mais Ok Na Chun est frileux. Il frissonna. Un courant d’air venait de s’engouffrer dans la grotte. Oh… et pis merde. Il n’y avait personne d’autres pour être témoin de ce petit moment… gênant… Il se leva, lançant un regard noir à Luce, histoire de la faire taire. Il n’était pas prêt à entendre une remarque acerbe de sa part… Il s’assit silencieusement à côté d’elle et la tira contre lui.

- Pas un mot. Maintenant ou à qui que ce soit plus tard. Ou j’te tue.

Au moins, ça avait le mérite d’être clair, non ? C’était juste au cas où elle avait pas compris le regard noir de tout à l’heure. On sait jamais, mieux valait assurer ces arrières. Pour le moment, il n’avait aucune envie d’entendre la voix de cette « charmante » demoiselle. Enfin… tout de même… la chaleur corporelle qu’elle dégageait était agréable… Mais chut, il n’allait tout de même pas le lui dire, ce serait dommage.

Na Chun bugua. Ouais, là, soudainement, il ressemblait plus à un ordinateur qu’à un animal. Du sexe ? C’était bien ce que Lucrézia venait de dire, n’est-ce pas ? Elle… était sérieuse ? Il la regarda avec des yeux comme dans ses soucoupes. Non, il devait avoir rêver… ou plutôt cauchemarder car ne vous trompez pas, elle ne lui faisait pas du tout envie… quoi que… Non. Pas du tout. Enfin, tout cela semblait irréel, comme si en entrant dans cette foutue forêt ils avaient changé d’univers… Ils n’étaient plus les mêmes. Ce n’était pas la « vraie » Luce à côté de lui… Et il n’était plus le vrai Na Chun. Tout cela n’avait plus aucun sens en bref.

- J’suis pas intéressé.

Menteur. Ouais, menteur. Car en fait, la proposition de Lucrézia l’avait plus qu’intéressé… Mais il ne voulait pas se montrer faible. Pas face à elle… Et le mensonge était depuis bien longtemps la meilleure de ces armes. Il était un maître dans cet art, il n’y avait qu’à demander à sa mère adoptive… ou tout du moins ce qui restait de lucidité à celle-ci lorsqu’elle n’était pas sous l’emprise de ses drogues. Mais peu importe, n’est-ce pas ? Ce n’était pas le sujet principal pour le moment… Il se contentait de respirer le plus calmement possible contre Luce. Elle était chaude. C’était agréable. Horriblement agréable. Cela faisait longtemps qu’il n’avait plus vécu un instant comme cela, de la tendresse. Ouais, c’était tout con… et ça lui arrachait la gueule de se dire qu’il partageait ce moment avec Elle. Finalement… c’était peut-être mieux qu’ils passent à autre chose… Pour son cœur, c’était certainement moins dangereux de partir dans le plus hard, ça l’affectait moins. Bon… mais… en même temps… si se rapprocher « intiment d’elle » - à comprendre sexuellement, évidemment – elle risquerait de croire qu’elle l’intéressait… Ce qui est totalement faux, rappelons-le. Bon… et merde.

Il soupira avant de poser une main sur la nuque de sa camarade… pour rapprocher leurs lèvres dans un baiser. Elle l’avait voulu, hein. C’était totalement de sa faute. De toute façon, toute cette histoire était de sa faute si on posait la question à Na Chun. Ouais, exactement, elle l’avait voulu, maintenant qu’elle assume un peu les conséquences de ces paroles. Le baiser dérapa bien vite… car après tout, c’était Na Chun qui l’avait engagé et rester à la surface des choses ne lui disait rien du tout. En plus, entre deux personnes consentantes – malgré leur énorme orgueil à tous les deux, précisons-le – il ne fallait pas trop faire tarder le plaisir. Au propre comme au figuré. Enfin, ça, c’était l’avis purement bestiale de Na Chun. Mais oui, vous savez, ce que vous dicte votre cerveau reptilien qui ne demande qu’une chose : se protéger soi-même ainsi que perdurer son espèce… Bon… d’accord… Là, procréer… c’était vraiment pas la chose qu’il cherchait à faire. Non, il faudrait mieux l’éviter. Ouh…. Ça ferait peur… Imaginez un instant ce donnerait un gamin de ces deux-là…. C’est une vision cauchemardesque, n’est-ce pas ? Mieux fallait que cela reste une simple vision, c’est moi qui vous le dit.

Tout cela allait bien trop vite pour leur santé mentale. Il y a peine deux minutes, ils se regardaient encore en chien de faïence… Enfin, cela n’avait pas vraiment changer. La seule variante était qu’ils mettaient leur frustration et leur rivalité à meilleur escient… Quoi que… Ils ne réglaient aucun problème en agissant ainsi. Ils ne faisaient que se voiler la face… Mais qu’est-ce que c’était grisant… Vous ne trouvez pas ? Ne plus entendre les remarques cassantes de sa camarade était reposant… surtout quand ces dernières étaient remplacées par son souffle légèrement haletant avoir comme fond sonore la pluie qui continuait à battre son plein. Ils étaient seuls. Coupés du monde… Ouais, tout jouait pour leur faire croire qu’ils étaient dans un autre monde et que rien de ce qui sera fait maintenant n’aurait d’importances plus tard… Mais était-ce vrai ? Non. Certainement que non. Na Chun avait beau ne pas être autant futé que Lucrézia, et être quelqu’un d’impulsif, il n’était certainement pas naïf au point de croire qu’il ne regretterait pas tout cela plus tard.

Ses lèvres dérivèrent rapidement vers la jugulaire… sous sa forme animale, il pourrait si facilement mettre fait à sa vie insolente… Mais il était contraint de se l’avouer à lui-même, il n’en avait pas envie. Ou en tout cas pas maintenant… Par contre la demoiselle s’était permis de le marquer d’un suçon… Ce geste n’allait pas rester impuni, c’est moi qui vous le dit. Il mordilla la zone qu’il se préparait à attaquer… Oui, il allait lui laisser une belle marque pour se venger. Comment pouvait-elle espérer le marquer ainsi ? Il était sauvage et ce signe de possession… cela l’aurait fait rager dans une autre situation. Mais là, il se montrait étonnement calme à ce sujet… Lui qui était pourtant épris de liberté jusqu’aux bouts des ongles…

Assez fier de la marque qu’il venait de faire, il se recula pour voir son résultat, tout en gardant ses bras autour de la nuque de la demoiselle. Un sourire en coin se dessina sur ses lèvres. La petite Luce semblait bien apprivoisée soudainement… Ou peut-être que ce n’était qu’une impression… mais au moins c’était une impression bien agréable pour lui. Il se rapprocha une nouvelle fois d’elle et lui lécha son nouveau suçon… Soudainement, les vêtements n’étaient plus si utiles que cela… Mais il se répugnait à les enlever. Il aurait l’impression de perdre, d’avoir rendu les armes trop vite… C’était à Luce de craquer maintenant, pas lui. Il avait déjà fait bien suffisamment d’efforts et de sacrifices par rapport à son mode de vie et son comportement. Si elle voulait plus… disons qu’elle avait qu’à venir le chercher… Déjà qu’il l’avait sorti plusieurs fois d’une mauvaise passe jusqu’à maintenant… A elle de faire quelque chose… Ouais, vous voyez, il était trop sympa, il lui laissait la main. Enfin, c’était surtout parce que cela l’arrangeait bien, mais chut, elle n’avait pas besoin de le savoir… Même si en réalité, elle devait certainement déjà s’en douter, n’est-ce pas ? Rahh… foutue est son intelligence supérieure à la sienne…

Lorsque Lucrézia arrêta tout pour s’arrêter… comment dire… Cela le… frustra ? Non. Il ne voulait même pas la toucher au début. Cela ne pouvait pas être cela. Il n’était pas faible à ce point. Elle l’était. Pas lui. Oh, non, pas lui… Il grogna, mais se contrôla pour le faire suffisamment bas pour que la demoiselle ne l’entende pas. Le pire serait qu’elle remarque qu’il était… non, pas frustré, mais contrarié. Juste contrarié. Néanmoins, il devait avouer qu’avec la pluie qui s’amenuisait, ils n’avaient plus vraiment d’excuses pour faire… ce qu’ils faisaient. Na Chun détestait être arrêter au plein milieu de quelque chose… En fait, il détestait tout simplement ne pas avoir le contrôle. Malheureusement pour lui, c’était aussi le cas de Luce. Le truc, c’est qu’ils étaient deux dominants. Cela ne pouvait pas coller entre eux. Ils tentaient tous les deux de bouffer la liberté de l’autre… Ils ne faisaient que se détruire à petit feu. C’était du suicide détourné en quelque sorte… On dirait presque que quelqu’un avait enfermé deux coqs dans la même cage. Il fallait qu’un d’entre eux s’écrasent pour qu’il y ait une chance qu’ils survivent. Mais aucun d’entre eux n’étaient prêts à faire ce sacrifice, évidemment. Ce serait trop beau que les choses se déroulent bien.

Il se leva brusquement et se dépêcha à la hauteur de la demoiselle pour la tirer contre lui et lui voler un dernier baiser. Langoureux… chaud… Ouais, il n’aimait pas qu’elle aie le dernier mot. Il fallait que ce soit lui qui gagne. Encore et toujours. Cela devenait comme une joute ridicule et enfantine entre eux. Une joute à laquelle ils risquent vraiment de se brûler les doigts s’ils continuaient sur cette pente. Il quitta les lèvres de Lucrézia avec un sourire triomphant, avant de quitter la grotte et de partir sous la pluie fine. Tant pis s’il était trempé maintenant… car de toute façon il fallait calmer le feu que la demoiselle venait d’allumer en lui. Ouais, là, il avait un petit excès de chaleur… Mais encore une fois, pour changer, il n’était pas prêt à l’admettre. Mieux valait se bouffer soi-même la langue que de sortir des conneries pareilles, selon lui. Il n’était pas quelqu’un de faible.

Il fit quelques pas, s’assurant tout de même que Lucrézia le suivait. On sait jamais… Il s’épuiserait sûrement plus à retourner en arrière la chercher que de simplement l’attendre de temps en temps. Il avait beau ne pas être sous sa forme animale, il restait rapide. Pour sa plus grande fierté, évidemment. En réalité, bien que cela lui fasse extrêmement de mal à se l’avouer à lui-même, il avait peu de « qualités » sous sa forme humaine… donc il était heureux de pouvoir au moins compter la vitesse parmi ceux-ci.

Bon… A part ça, ils avaient intérêt à trouver rapidement ce foutu œuf car là, il saturait. Il allait bientôt explosé… Bordel avec ce foutu jeu, il n’y avait plus aucune liberté ! Il se sentait complètement enchaîné et cela ne lui plaisait pas du tout ! Légèrement sur les nerfs, il s’enfonça une nouvelle fois dans cette stupide forêt qu’il allait bientôt brûler jusqu’au dernier arbre si les choses ne s’arrangeaient pas.

Bordel. Cette nana n’en ratait pas une. Elle était une véritable malédiction à elle toute seule… Il aurait dû la laisser sous la pluie. Il aurait dû l’assommer et l’abandonner dans la grotte… Il aurait dû tellement de choses. Mais dans sa tête, il n’arrivait même pas à se convaincre qu’il aurait dû la tuer depuis bien longtemps. Elle n’était pourtant qu’un parasite… et il n’arrivait même pas à souhaiter sa mort. Il était faible. Si faible qu’il se faisait honte tout seul dès que la demoiselle pénétrait dans les environs. Elle avait bien trop de pouvoir sur lui pour qu’il se permette de la côtoyer sans danger… Cette fois, c’était décidé. Dès qu’ils seraient sortis de toute cette histoire, il l’éviterait jusqu’à la fin de sa vie. Il ne voulait plus prendre le risque de la recroiser et de faire des choses insensées juste à cause d’aide. Il en allait de sa survie. Et son instinct de survie était très développer, contrairement à la majorité des humains. Bon… pour le moment… ce serait peut-être une bonne idée de chercher une solution pour sortir de cette situation, non ? Car là, il n’était pas très confortablement installé. En cet instant même, il était écrasé sous le corps de Lucrézia… mais pas forcément dans la situation de tout à l’heure, qu’il aurait privilégié… Nan, là, ils étaient suspendus dans un filet à deux mètres au-dessus du sol. Ouais, là, Na Chun en avait sérieusement marre. Non, même plus que marre… Il allait péter un câble. Pleins de trop pleins cumulaient en lui. La frustration, l’agacement, l’énervement, l’impatience,… tout se mélangeait.

S’il était en mode animal, il pourrait user les cordes avec ces dents… Mais la chute serait douloureuse… De plus, il n’avait pas envie de se retrouver en forme de guépard sous Lucrézia. Pas qu’elle était vraiment lourde mais… ses os d’animaux étaient malheureusement pas très épais. Ouais, dans le cas contraire, il ne pouvait pas courir si rapidement. Question d’aérodynamisme. En plus… il n’avait pas franchement envie de se retrouver nu une fois de plus devant elle… surtout après ce qu’elle lui a fait arrêté il y a à peine quelques minutes. Tss. Il en avait raz le cul que depuis le début de cette journée, c’était toujours lui qui les sortaient d’affaires. Il était temps que Luce bouge un peu ses fesses, non ? Qu’elle montre enfin ces « fabuleux talents » dont il n’avait même pas vu l’ombre…

- Bon, cette fois tu vas nous servir à quelque chose, Mademoiselle ?

Son ton était méprisant. Là, il ne fallait pas le chercher, il était sur les nerfs, prêt à mordre si besoin. Mais en même temps, il était certain que Lucrézia allait remettre une nouvelle fois les pieds dans le plat. Oui, elle semblait jubiler de le voir sur à bout de nerfs. Sadique. S’il avait pu, il aurait croiser les bras pour affirmer ces paroles… Le problème, il y avait un de ces bras sous ses propres fesses et l’autre… sur le sein de Luce ? Non. Pas possible. Il devait rêver. Ou cauchemarder, au choix… D’abord, depuis quand elle avait des seins, cette dernière ? Il retira rapidement sa main pour la poser sur sa propre cuisse.

Na Chun allait la tuer. Lentement, en appréciant de voir son agonie… Oui, il prendrait tellement de plaisir à la torturer… Lui en faire baver pour qu’elle regrette tout ce qu’elle lui avait fait. Oui, il fallait qu’elle se repentisse cette demoiselle. C’était injuste qu’elle s’en tire sans rien… Avec elle, il avait toujours l’impression de s’en prendre pleins la gueule. Bon… d’accord… c’était pas tout faux… Et encore heureusement qu’il ne se remémorait pas toutes les fois où elle l’avait kidnappé pour « tester son corps » d’animorphe. Il manquerait plus que ça. Oui, heureusement pour elle que ses drogues fonctionnaient bien.

Et maintenant qu’elle l’accusait de bander… Nan mais franchement cette demoiselle avait un culot sans nom. Mais Na Chun ne répliqua pas. Il se voyait mal lui dire qu’en réalité c’était son teaser qu’il baladait tout le temps avec lui au cas si une de ces arnaques dérapaient… Teaser acheter illégalement, bien sûre. Mais il n’était pas vraiment rare qu’il fasse des choses illégales. Non, c’était plutôt quelque chose de courant. A se demander presque s’il pouvait passer une journée en totale légalité… Cela lui semblait impossible. Surréaliste. Et sa mère (adoptive) ne serait pas la dernière à l’avouer. Même plutôt la première, pour tout avouer… Mais là n’était pas la question…

Il atterrit violement au sol. BORDEL ! Elle aurait pu le prévenir ! On dirait pas comme ça – pour elle en tout cas – mais ça faisait vachement mal ! C’était d’ailleurs un véritable miracle s’il ne s’était pas cassé une côte ou deux… Il se releva péniblement. Bon, les os cassés, il semblait avoir réussi à éviter… Mais certainement pas les bleus. Il y aurait droit, sans doute possible. Et là, il vit que Lucrézia avait l’œuf dans ces mains. Aussitôt, comme par magie… cela le calma. C’était enfin terminé. Ils allaient pouvoir rentrer chacun de leur côté. Enfin. Oui, cela faisait bien trop longtemps qu’ils se côtoyaient. Cela devenait vraiment trop dangereux.

Encore une fois, Na Chun n’ouvrit pas la bouche à la remarque de sa camarade. Était-il malade ? Non, là, en fait, il était fasciné par l’œuf qu’elle venait de lui donner. C’était étrange mais… Il le trouvait beau. Il se demandait lui-même comment il pouvait être sous le charme d’une chose si… banale. Il avait l’impression d’être un abruti, la bouche ouverte devant un tableau signé Picasso. Ou la télévision, c’était le même résultat. L’œuf était chaud. Tout à coup, son instinct animal lui signala la vie de… quelque chose à l’intérieur. Il ne saurait comment l’expliquer – et de toute façon, il ne verrait pas l’intérêt de faire un quelconque effort pour – mais il pouvait le sentir. C’était fascinant et effrayant. Là, tout à coup, il se dit que ce n’était peut-être pas prêt de finir… Et dire qu’il avait pleins d’arnaques présentes sur le feu… Enfin… C’était quoi encore cette histoire ? Il inspecta minutieusement l’œuf. De quel animal, venait-il ? Il ne ressemblait à aucun autre qu’il n’ait vu jusqu’à maintenant. Et il ne voulait surtout pas poser la question à Mademoiselle Luce, cela voudrait avouer qu’elle était plus intelligente que lui. Même s’ils le savaient tous les deux aussi bien que l’autre, il n’était pas prêt à admettre sa défaite…