L’ahurissement d’Anabeth n’avait eu de cesse de grimper à chaque nouvelle découverte, d’abord l’éclosion de l’œuf, d’où trois petites têtes canines avaient émergés simultanément. La curiosité avait précédé l’étonnement, pourquoi cette charmante petite créature les attendait ? Elle eût la réponse bien assez tôt. Un employé les accueillit solennellement, leur tendant par la même occasion une clé. La clé de leur futur appartement. Un domicile commun. Un rire nerveux lui avait échappé ce jour-là, et s’était imaginé une bonne blague : que nenni. Cela faisait maintenant deux jours que le couple vivait en compagnie de leur protégé. Ana ne s’était pas montrée très avenante lorsque la nouvelle était tombée, un air pantois peint sur le visage. Elle ne comprenait vraisemblablement pas le fonctionnement de cet « évènement », la chasse dangereuse, l’adorable bébête, et la colocation. Une fois installée, elle s’était enfuit sous la douche, prenant bien soin de verrouiller la porte cette fois-ci, et c’était lavée de toutes les saletés, les remords, l’irritation de la journée, pour laisser place à la lassitude. Pour tout dire, Anabeth adorait leur cerbère, dès qu’elle le pouvait, elle jouait avec, grattait l’arrière des six oreilles, comme une maman quoi. Quant à Edge, la distance était toujours de mise, les discussions étaient courtes, et ils ne voyaient pas vraiment, lui bossant le jour.
Ce fût pensive qu’Anabeth quitta sa chambre, ce soir-là. A vrai dire, chaque fois qu’elle passait la porte son cerveau cogitait bien plus qu’il ne lui était nécessaire. Elle pensait à Edge, principalement, à la morosité qu’elle avait consciemment incrustée entre eux, la peur des préjugés lui tiraillait l’estomac, et elle ne savait pour quelle sainte raison son propre mur lui pesait ! Yanna ne lui avait pas non plus donné de nouvelles, leur plus longue séparation ne durait pas plus d’une nuit, et ne plus avoir sa rassurante présence lui manquait. Décidée de ne pas se laisser bouffer par des pensées déprimantes, chose qui ne lui ressemblait décidément pas, elle se dirigea vers le frigidaire, s’abreuva d’une bouteille au liquide cramoisi, épais. Il lui avait fallu puiser dans ses réserves afin ne pas cumuler trop d’aller-retour nocturne, et donc se nourrir en conséquence. Une fois épuisée, le cadavre en plastique se retrouva au fond d’une poubelle. Requinquée, la demoiselle se dirigea en direction du canapé, incapable de décider sa future activité. Le cerbère somnolait là, sur le divan, battant ses pattes dans le néant, alternant couinement et grognement, probablement profondément concentré dans son cauchemar. Attendrie, Anabeth s’installa près de la créature, et se mit à caresser avec la grande tendresse l’animal. Le comportement incohérent des trois têtes se calma progressivement, illuminant un instant son visage jusqu’à lui décocher un sourire.

Décidément les surprises ne manquaient pas dans cet espèce de chasse aux cocos nouveau genre. Que l’oeuf ait éclos dans ses mains avait déjà été surprenant, mais que ce soit une créature à trois têtes qui en sorte c’était encore plus bizarre ! La même journée il apprenait qu’Anabeth était un vampire et qu’il devrait s’occuper d’une bête bizarre, ses repères d’être humain normal avaient été chamboulés et il n’appréciait pas tellement. Comme si ce n’était pas suffisant, il fallut qu’il apprenne qu’il allait vivre avec la jeune femme pour les prochaines semaines. Contrairement à la demoiselle, il l’avait plutôt bien pris et ça avait servi de baume sur les surprises de la journée. Ce serait le meilleur moment pour comprendre pourquoi elle avait mis une distance entre eux. Ils n’étaient peut-être pas les meilleurs amis du monde, mais après qu’elle lui ait sauvé la vie deux fois plutôt qu’une, il avait espéré que leur relation soit un peu... mieux ? C’était loin d’être le cas et malgré la déception que ça lui amenait, Edge tenta de se motiver à forcer un minimum de discussion, ne serait-ce que pour comprendre.
Chose plus difficile à dire qu’à faire puisqu’à la base, il n’avait pas les mêmes horaires qu’Anabeth et son travail le forçait à partir pendant la journée. En prime, sa patronne semblait décidée à lui faire payer on ne sait trop quelle faute puisqu’elle le forçait à faire des heures supplémentaires pour les deux premières soirées. Crevé en arrivant, il n’avait pas le courage d’affronter la demoiselle dans une discussion plus sérieuse que les dernières nouvelles concernant leur cerbère. À la fin de sa deuxième soirée, le jeune homme annonça qu’il prendrait la prochaine journée comme congé.

Sur le chemin du retour, Edge s’arrêta pour acheter un petit quelque chose pour leur créature et pour la jeune femme. Il ne savait pas si ça leur plairait, mais c’était la meilleure idée qu’il avait. Il finit par rentrer dans l’appartement, retirant ses chaussures sur le tapis à l’entrée avant d’apercevoir la demoiselle. Elle était en train de s’occuper de leur petite boule de poils et même si un sourire s’étira sur le visage, il ressentit une petite pointe de jalousie totalement puérile. Lui il avait pratiquement droit à une douche glaciale lorsqu’elle lui adressait la parole et leur cerbère avait droit à de belles caresses, injustice quand tu nous tiens. Réprimant ce genre de pensées, il s’approcha de la jeune femme pour lui mettre la fleur qu’il avait acheté sous le nez. « Si tu veux sortir cette nuit, je peux rester éveillé pour m’occuper de lui... elle... » Et par ça il désignait la boule de poils qui dormait. Par la même occasion il vint déposer les petites peluches qu’il avait acheté proche de la créature, suite à quoi il ajouta : « Tu crois qu’on devrait lui donner un nom ? » Après tout, s’ils devaient s’en occuper, il vaudrait mieux le nommer ! Un beau sourire sur les lèvres, il vint s’assoir près de la jeune femme, mais à une distance raisonnable pour éviter un quelconque malaise.

Le cliquetis de la serrure l’obligea à relever les yeux en direction du hall d’entrée, continuant malgré tout de malaxer le crâne du bébé. La silhouette de son colocataire lui apparût alors qu’il refermait la porte. Anabeth avait l’habitude de le voir rentrer à des heures tardives, éreinté par les journées de travail. Ils n’échangeaient pas plus que des formules de politesse, et le blond partait se coucher tandis qu’Ana débutait sa nuit, néanmoins elle doutait que la situation ne puisse perdurer sur cette note si triste. Enfin, elle se concentra de nouveau sur la créature endormie, jouant avec ses poils, tout en douceur. Edge vint les rejoindre, s’installant à l’opposé de la vampire, probablement pour garder des distances de sécurité.
Pour tout dire, la brune s’était imaginé vivre une soirée au rythme que les autres, mais l’attention que lui porta le policier balaya cette pensée. La proposition d’Edge lui parût alléchante, mais s’occuper du petit monstre lui plaisait d’avantage. « Non, ça ira, j’ai de la réserve. » lui répondit-elle d’un ton réservé, tout en hochant la tête en direction du frigo dans lequel campait quelques bouteilles pleines. Magiquement, des pétales d’un rouge intense surgirent du dos du blond, obligeant la vampire à loucher. « Ah… oh, merci. » balbutia-t-elle, étrangement ébranlée par le geste du garçon. N’étant guère l’habitude de perdre contenance pour si peu, Ana porta la fleur à son nez, s’imprégnant du délicat parfum qu’elle dégageait. Cette odeur lui rappelait les allées bordées de rosiers de son enfance, elle adorait s’en confectionner d’énormes bouquets et les disperser à travers la maison. Satisfaite du petit présent qu’Edge avait pris la peine de lui offrir, elle releva ses prunelles vertes en sa direction, la rose collée contre ses lèvres, elle remarqua le petit clan de peluches encerclé le cerbère. Il lui était difficile d’alimenter sa méfiance face à tant de courtoisie. Le policier se manifesta une seconde fois, proposant cette fois-ci de nommer leur petite boule de poils, « Oui. C’est une bonne idée. » Elle y avait vaguement réfléchi, mais aucun nom potable ne lui était venu à l’esprit. « On peut y réfléchir pendant que je mette cette magnifique rose dans l’eau. » presque gênée de lui avoir exprimé son ravissement, elle quitta le divan, déposant un tendre baiser sur l’une des têtes de l’animal. Derrière le comptoir, elle farfouilla un peu avant de trouver un verre, récipient de substitution puisque le vase restait introuvable. « Sinon, la journée s’est bien passée ? » trouver ses mots était compliqué, elle n’avait aucune idée de conversation, et bien souvent il s’agissait de sujets épineux ou embarrassants ; les questions bateaux étaient une meilleure solution. Embarrassée par son manque de créativité, elle se focalisa sur la tige fleurie, l’immergea à moitié. Elle juchait sur dorénavant sur le comptoir de la cuisine, belle et parfumée.

Son regard passant de la jeune femme au cerbère, Edge attendait sa réaction avec attention. Pas qu’il voulait qu’elle ne parte, simplement peut-être avait-elle envie de se promener et puisqu’elle était celle des deux qui s’occupait le plus de la bestiole, il pouvait bien lui proposer de se changer les idées. Refusant la proposition du blond, elle eut néanmoins une réaction des plus adorables face à la rose. Bizarrement, il ne s’était pas imaginé qu’elle aurait une réaction quelconque, après tout, ce n’était qu’une rose et elle avait du en recevoir des centaines dans sa vie. Enfin, elle avait quel âge en fait ? La question lui brûla les lèvres, mais il préféra proposer de nommer leur petite bête. Le policier suivit la jeune femme alors qu’elle embrassait le cerbère et la pointe de jalousie s’éminça à nouveau chez lui. Néanmoins, il finit par dire avec un sourire « Je suis content qu’elle te plaise, je savais pas ce que tu préférais... » Enfin ce n’était pas ce qu’il y avait de plus important, ce pourquoi il préféra ajouter : « Est-ce qu’il faudrait lui donner un nom par tête ? » La question pouvait sembler débile, mais puisque les trois têtes semblaient penser différemment, peut-être que leur donner des noms différents serait approprié. Par contre, il ne fallait pas penser que le jeune homme était un minimum doué pour trouver des noms, il n’avait pas hâte de voir les idées qu’il sortirait le jour où il serait père. La question d’Anabeth le fit lever le regard de la petite boule de poils et il haussa les épaules avant de dire : « C’était pas si mal si on oublie les heures supplémentaires. Enfin, j’avais pensé prendre congé pour demain, question de t’aider un peu... » Son regard resta braqué sur elle, guettant sa réaction. C’était la moindre des choses après tout !

Malgré cette belle conversation fort intéressante, Edge avait plutôt l’intention d’en changer le sujet. Cette distance entre Anabeth et lui le dérangeait. Puisque la jeune femme l’avait visiblement mise entre eux après lui avoir dévoiler sa nature de vampire, il était prêt à parier que c’était le problème. Il ne savait malheureusement pas comment aborder le sujet sans risquer de la froisser, mais le policier était ce qu’il était, il était stupide de penser qu’il passerait par plusieurs chemins pour avoir ses réponses. Après tout, sa condition le fascinait et il ne voulait pas laisser cette distance entre Anabeth et lui, alors ça ne valait pas la peine de faire plusieurs détours. « Mis à part, guérir par toi-même, c’est quoi être un vampire pour toi ? » Très sérieux dans sa question, il ajouta tout de même : « Parce que ça me semblait vraiment... génial cette capacité, mais j’imagine que ce n’est pas tout rose... » Peut-être dépassait-il les bornes et qu’elle ne voudrait pas répondre, mais... il pouvait tout de même essayer non ? Puis, il ne perdait rien à lui demander une question dont il voulait vraiment la réponse ! Après, il aurait peut-être du y aller plus doucement dans son changement de sujet...

Un nom pour chaque tête n’était pas une mauvaise idée, c’était même ingénieux. Des noms similaires, faciles à retenir, avec lesquels on ne s’emmêlait pas les pinceaux. Rien ne lui venait à l’esprit présentement, mais il serait idéal d’y penser d’avantage. « Tu as raison oui, trois noms. » Leur sujet de conversion variant sensiblement d’une parole à l’autre, elle ne s’attarda plus sur le choix des noms, écoutant Edge se plaindre sur la dure réalité du boulot, et une nouvelle fois lui proposer son aide. Il était décidément bien motivé à lui porter secours, bien qu’elle n’en ressentît nullement le besoins. « C’est une gentille intention, mais ce n’est pas nécessaire, tu sais… » une seconde fois, Anabeth déclina la chaleureuse proposition, non pas sans scrupules tout simplement parce qu’il n’y avait pas nécessité. Le cerbère passait le trois quart de son temps à ronfler sur les aires confortable – lits, fauteuils, coussin, tout y passait.
Autant dire que la surprise fût totale lorsque le policier la questionna sur son état de vampire. Les yeux ronds comme des billes, elle le dévisagea, abasourdie par la curiosité et le culot dont faisait preuve Edge, puis bredouilla une suite de syllabe incohérente. « Euh… je… hm… c’est… » un rire nerveux s’extirpa de sa gorge, résonnant à travers la pièce. Anabeth hésitait à lui répondre, elle savait pertinemment qu’il ne s’agissait pas d’un intéressement pervers sur sa race, mais elle ne s’était pas attendue à se voir poser la question si tôt. « Hm, c’est une bonne chose, pour ce genre d’excursion, oui. » une partie des données manquait à sa phrase, se rendant compte de son erreur, elle rajouta promptement « Comme il y a deux jours. » un raclement de gorge, elle ne pouvait s’empêcher de jouer avec ses doigts, se mordiller la lèvre inférieure, trop nerveuse pour se concentrer. « Mais la douleur reste la même. Malheureusement. » Fait qu’il avait probablement constaté lorsque le faucon avait embroché l’épaule du vampire. Il n’y avait rien de remarquable là-dedans, la peine ressenti amenuisé le charme cette si grandiose capacité. Ana le sentait captivé, un peu trop peut-être, ainsi se décida-t-elle de reprendre contenance et de le rejoindre sur le divan, se réappropriant la place qu’elle avait délaissé plus tôt. « Pourquoi cette question ? » elle le questionna d’un air circonspect, tout en rencontrant de nouveau le poil soyeux du cerbère, le gratifiant de caresses.

Trois noms, s’il avait du mal à en imaginer un seul, il se voyait mal en trouver trois, mais bon ce n’était plus trop le sujet de la conversation qui changeait peu à peu. C’était la même chose pour la proposition de passer le lendemain avec elle, même si, bien qu’elle avait refusé sa compagnie, Edge aurait quand même le congé. Eh bien, il lui apprendrait un autre moment, là il avait plutôt envie de parler d’autre chose, même s’il craignait que sa curiosité soit mal reçue. Enfin, c’était un risque à prendre, en parler aiderait peut-être la distance à disparaitre ou du moins c’était qu’espérait le jeune homme. Visiblement, il eut au moins le mérite de surprendre Anabeth avec sa question, il la regarda en silence, craignant d’avoir empiré les choses au final. C’était rare de voir le jeune homme si attentif, mais il ne bougea pas d’un poil en attendant la réponse à sa questions, si réponse il y avait. La douleur restait, c’était ce qu’il avait cru comprendre avec l’épisode du faucon... « Alors pourquoi tu te mets autant en danger ? Ça t’aurait éviter d’avoir mal si tu avais laissé le faucon m’attaquer... » Son regard suivit la jeune femme alors qu’elle retournait à sa place de départ, sa main retrouvant le poil du cerbère ce qui inconsciemment attira à nouveau la jalousie du jeune homme. C’était idiot, après tout, le cerbère restait une créature et c’était totalement différent, mais la douceur dont elle faisait preuve était... différente voilà tout. Suite à la question de la demoiselle, ce fut au tour du policier de se sentir gêné. Il ne saurait dire pourquoi il avait posé la question si bien qu’il préféra dire : « Aucune idée... simple curiosité je crois. » Comme ça sonnait faux, mais la réalité était stupide. Après un moment de silence, un rire nerveux sortit de sa gorge avant qu’il n’ajoute : « C’est juste que la réalité différente des légendes et c’est intriguant. Je ne sais pas pour les autres, mais tu es loin d’être un vampire lugubre, effrayant ou détestable alors je voulais savoir c’était quoi la réalité. » Puis il devait avouer que la capacité qu’elle avait était juste impressionnante pour lui, mais ce n’était pas comme s’il prévoyait de se faire transformer.

Un autre petit éclat de rire nerveux traversa sa gorge alors qu’il baissait le regard vers le cerbère qui dormait encore. Dans un élan de tendresse envers la petite créature, Edge approcha sa main dans le but d’offrir une petite caresse. L’odeur différente de celle de la vampire dut réveiller la boule de poil qui regarda le policier d’un oeil mauvais... avant de lui mordre la main. Ses crocs tailladèrent son index et le sang commença à couler de la blessure. Ironisant la situation, le jeune home dit : « Tu vois, j’aurais pratiquement besoin de ta capacité ! » Suite à quoi il lança un regard mauvais à la bestiole. Vraiment, ce n’était pas le grand amour entre l'homme et la bête !

Anabeth esquissa un léger sourire lorsqu’Edge se demandait la raison qui l’avait poussé à se sacrifier pour lui, quitte à subir de douloureuses et profondes blessures. Lui n’était qu’un homme, déjà les premières griffures que lui avait assené le fauve l’aurait probablement cloué au sol de cette forêt pour la nuit, si ce n’est plus, sans le don que lui avait fait Ana. Le faucon enragé, quant à lui, n’y serait pas allé de main morte, jusqu’à lui défoncer le crâne, et il n’imaginait pas qu’il puisse supporter une peine aussi vive que lorsque l’oiseau avait enfoncé sans ménagement ses serres dans son épaule. Pour finir, elle n’était pas un monstre, et il ne s’agissait pas de son premier coup d’essai, peut être importe l’intensité du coup porté elle survivrait – excepté pour toute arme boisée. C’était ça, ou tu aurais fini par pleurer comme une petite fille, pensa-t-elle, ou pis encore, il serait mort. Installée de nouveau auprès des deux mâles de la maison, elle se contenta d’écouter les explications que lui fournissaient Edge sur l’intérêt soudain qu’il lui portait. Il était vrai qu’on fabulait sur les vampires des légendes austères, tantôt réalistes tandis ridicules. Les canines, le sang, la terreur, la violence, tout cela leur était propre, tout comme on oubliait leur part d’humanités piétinée par les rejets des autres, la brutalité des émotions et l’instinct de survie. Son parcours à elle était loin d’être blanc, mais elle omettrait volontairement de le préciser. « C’est gentil, mais… la plus part des vampires ne sont pas compatissant. Je pourrais te mordre sur un coup de tête. » A ses mots, les traits de son visage se durcir, et son regard jusque-là radoucit, se faisait intransigeant. Lui faire peur ne faisait partie du plan d’Anabeth, non, elle le prévenait simplement des risques afin de connaître sa réaction face à ses paroles menaçantes.
Dans un grognement inattendu, la créature mystique s’éveilla et dans un élan de vilénie planta ses petits crocs acérés dans la main du garçon, suffisamment fort pour le faire saigner. Etonnée de la réaction de la bête, qui après s’être défoulée, vint se frotter contre son ventre et se nicher sur ses cuisses. L’air triomphantes, les trois têtes jetèrent des regards hostiles en direction d’Edge, pour finir par se reposer de nouveau. Effectivement le mâle n’avait pas manqué son concurrent direct, et le blond exprima l’utilité du don de guérison face à la morsure. Elle l’admettait, et bien qu’elle fût tenter de lui offrir une goutte de son sang, elle se souvint des effets secondaires. « Oui, mais un pansement est aussi efficace ! » répondit-elle, tranquillement. « Je vais t’en chercher un pour la peine. » à vrai dire, l’odeur du sang lui chatouillait les narines et lui excitait les papilles, alors avant que ses canines ne s’allongent sous les yeux du policier, elle préféra se retirer dans la salle de bain, abandonnant la boule de poils par la même occasion. « Sois sage. » Ordonnant cela au cerbère, elle lui ébouriffa la tête la plus à droite. Tentant d’apaiser l’appel du sang qui la tiraillait, Anabeth s’isola dans la salle de bain deux minutes. Une fois sortie, munie d’un coton imbibé de désinfectant et d’un pansement, elle se rassit, malgré le tumulte incessant de ses sens, et pria le garçon de lui montrer sa blessure : « Donne-moi ton doigt. »

Les explications d’Edge face à son intérêt pour la condition de la jeune femme était peut-être vaseuse, voir ridicule, mais il pensait ce qu’il disait ou du moins ce qu’il avait ajouté. Il y avait aussi le fait que sa capacité serait des plus utiles pour le jeune homme et que c’était vraiment classe quoi ! Ce qu’elle lui répondit le surprit, mais il tâcha de ne pas trop le montrer. Le mordre ? Elle pouvait bien le faire si elle voulait, il n’allait pas mourir à cause d’une morsure. Essayant de lire les intentions de la jeune femme, il finit par hausser les épaules. « Vas-y, mords moi si tu veux. » Très sérieux dans ses propos, il se demandait néanmoins si elle allait réagir à cette belle proposition. Il ne tenait certes pas à ce qu’elle le fasse absolument, mais la curiosité qu’il avait envers sa réaction était suffisamment grande pour qu’il le propose. Il attendit sans rien dire pendant un moment avant de dire : « Puis, ce n’était pas comme si les humains étaient tous compatissants. Je suis peut-être un exemple merveilleux, mais voilà quoi. » Et un sourire se dessina sur ses lèvres pour montrer qu’il plaisantait, il ne se voyait comme un bel exemple ; il n’aurait pas tiré sur son frère. « Je plaisantais évidemment. » ajouta-t-il après un moment. Pas qu’il irait dire les raisons qui le poussait à plaisanter sur l’exemple qu’il donnait.

Le réveil de la créature se révéla court, mais le cerbère en profita pour l’attaquer sans grande raison. Minant une déception lorsqu’elle parla de bandages au lieu du don génial qu’elle avait. Sauf qu’il ne comptait pas tellement pas débattre de ce fait, puisqu’elle avait raison par rapport au fait qu’un bandage. Son regard ne quitta pas le boule de poils alors qu’il remercia la jeune femme d’un air distrait. Il aurait bien essayé de se rapprocher de la petite bête, mais pour le bien de ses doigts, il préféra rester à sa place, attendant Anabeth. Edge releva le regard lorsque la jeune femme sortit finalement de la salle de bain et il obtempéra rapidement à sa demande pour se rapprocher afin de ne pas passer sa main par dessus le cerbère. S’assoyant sur le même divan que la demoiselle, un peu trop proche cette fois-ci, Edge lui tendit le doigt ignorant que le sang énervait ses sens. À croire qu’il n’avait pas encore totalement capté que le sang avait un effet sur elle. « Au final tu vas passer ton temps à t’occuper de moi si ça continue. » Oh, évidemment, il disait ça et il en était content, il était bien loin de se plaindre ! S’il le plaindrait de quelque chose, c’était plutôt le comportement de la créature dont ils s’occupaient.

« Vas-y, mords-moi si tu veux. » Anabeth hoqueta de surprise après la déclaration pour le moins singulière du policier. Elle était prête à rire, mais le sérieux qu’il démontra la ravisa rapidement. Préférant garder le silence au vue de sa réaction suffisamment explicite, elle l’écouta et le contenu de ses mots lui décocha un sourire gauche ; il la surprenait drôlement ce soir ! Il était vrai que les humains étaient l’incarnation de la lâcheté et l’aura d’outre-tombe des vampires les glaçait jusqu’au sang tant la mort les effrayait. Pire : certains étaient plus meurtrier qu’un vampire, et on se demandait s’ils n’étaient pas dénués d’âmes. Bien que la blessure infligée par leur bête coupa leur conversation, Ana s’accordait qu’Edge il n’était en rien similaire à ses monstres. Quittant au plus vite le divan afin d’éviter la tentation, elle se présenta de nouveau cette fois-ci prêt à endosser le rôle d’infirmière malgré le sang, de quoi prouver qu’elle contrôlait ses sens, lui mais aussi à elle-même. Alors il s’approcha, se posant près d’elle, lui tendant sagement la blessure. Elle désinfecta la plaie rapidement, puisque l’entaille n’était pas profonde, puis muette continua son job en pansant le doigt. Voilà, elle ne serait plus tentée. Pour le moment.
Néanmoins, ce soir ils se testaient. Une lueur de défi brillait en travers les yeux d’Ana alors qu’elle finissait de poser le pansement, elle lui demanda par simple curiosité. « Tu veux vraiment te faire mordre ? » Brutalement elle empoigna la mâchoire du garçon, et l’orienta quelques degrés plus à droite. La gorge désormais à découvert, la chance d’Edge à réchapper à l’emprise d’Anabeth était… limite, nulle. Si une distance avait existé entre eux, elle s’évanouissait peu à peu alors que la vampire se penchait sur sa victime, enfouissant son visage près d’une veine jugulaire. Ses longues canines déployées frôlèrent la peau blanche du prisonnier, leurs pointes avides de trancher la chair. Un frisson la parcourra, ni plus ni moins le désir de puiser une gorgée d’un liquide dont elle avait oublié le goût, mais l’exaltation qu’il procurait une fois lapé. Son souffle chaud caressa une dizaine de secondes la peau du policier, indécise, avant que le cerbère ne se mette à aboyer en sa direction, libérant sa maitresse de tumultueuse tentation que lui provoquait le sang humain. S’arrachant vaille que vaille à la gorge, Ana rétracta ses vilaines dents et reprit une position correcte. Elle jeta un dernier coup d’œil en direction de sa nuque dégagé, où seule de l’empreinte de ses lèvres persisterait, vestige d’un suçon apposée par ses soins. Décontenancée soudainement, elle relâcha le visage encore emprisonné. Légèrement embarrassée par la tournure des évènements, la belle s’éclaircit la voix, tapotant tendrement, à tour de rôle, les différents crânes de la petite créature dans le but de la rassurer. « Ca ne te fait pas peur ? » lui demanda-t-elle, bien que la véritable question se formulerait plutôt de la sorte : je ne t’effraie pas ? Pratiquement calmée, elle n’osait toutefois pas lever la tête, trop incertaine de sa propre réaction.

S’il semblait surprendre Anabeth avec ce qu’il disait, Edge guettait les gestes de la jeune femme. Il était à l’affut conscient que la proposition qu’il avait fait risquait de lui apporter quelques ennuis. Ça ne le gênait pas, il se riait du danger depuis tout petit, mais tout de même, il était mieux de regarder avec attention ce qu’elle prévoyait faire. À croire qu’il ne surveillait pas la bonne personne puisque ce fut leur créature pour l’instant innommée qui s’occupa de le mordre. Le rôle d’infirmière fut endossée par Ana qui se retira un moment dans les toilettes, laissant le jeune homme seul avec la bête. Préférant rester loin de l’animal, il se contenta d’attendre patiemment. La patience n’était certes pas sa plus grande qualité, mais pour la peine, il pouvait bien faire exception. Lorsqu’elle fut de retour, Anabeth s’occupa rapidement de la blessure et quelques instants plus tard la normal revint dans la demeure. Enfin, c’était bien ce que croyait le policier qui se contentait de faire remarquer à quel point la jeune femme était de corvée en s’occupant de lui.
Pour le coup, il avait abaissé sa garde en entendant sa question, quoi qu’elle ne lui aurait probablement été d’aucune utilité contre la demoiselle, et sa mâchoire finit brutalement empoignée par Ana. Sachant bien que ses gestes avaient un rapport avec la question, Edge tâcha de rester de marbre malgré son rythme cardiaque. Allez savoir si c’était la peur ou à cause de la proximité qui s’imposait entre eux. Pour le coup, il ne bougea pas, réalisant bien que ses chances de s’échapper étaient nulles et que ce ne serait pas le bon comportement à aborder. Il sentait le souffle de la demoiselle sur son coup et s’il fut tenter d’essayer de renverser la situation vers quelque chose de plus plaisant, il se contenta de garder sa constance. Heureusement pour lui, le cerbère mit fin à la présence des canines près de son coup et un instant plus tard, son visage fut libéré.

La question de la jeune femme le fit sourire, mais il n’y répondit pas immédiatement. Son regard resta ancré sur la jeune femme et la façon dont elle se comportait avec la boule de poil. C’était une injustice totale, mais il préféra ne rien dire avant de se rapprocher un peu plus d’elle avant d’imiter le geste qu’elle avait fait, mais avec plus de délicatesse. Sa main captura le visage d’Anabeth, bien qu’Edge était totalement conscient qu’elle pourrait se libérer si elle le désirait et il le fit pivoter pour qu’elle lui fasse face, avant de répondre : « J’ai l’air d’avoir peur ? » Son ton était moqueur, voir provocateur et le sourire qu’il avait sur les lèvres lançait le même message. Ses yeux étaient la seule chose qui sortait du lot parce qu’on pouvait y lire beaucoup de tendresse, mais l’expression se durcit un peu en entendant les jappements du cerbère. À croire que la vapeur se renversait et que c’était maintenant la petite bestiole qui était jalouse ! Son visage se rapprocha un peu plus de celui de la jeune femme, laissant tout de même un minimum de distance et resta à cette distance pendant un bon moment. Il ajouta : « Alors ? » Avant de finalement reprendre la position initiale avec un beau sourire pour s’exclamer : « Il faut croire qu’il y en a un qui est jaloux ! » Il se demandait bien comment son geste serait interprété, mais bon.

Oser, elle avait osé menacer Edge, sans ménagement, presque bestialement. Elle avait défié ses sens mille fois torturés auparavant, aujourd’hui elle avait vaincu fébrilement. Anabeth avait dû quitter cette gorge follement appétissante, s’extirper de la voluptueuse tentation que lui procurait ce sang. Un sang avidement convoité, et pourtant renié par ses soins. Elle remerciait silencieusement le cerbère, tête baissée, honteuse de sa propre faiblesse. A cet instant, le rythme cardiaque du garçon lui hantait encore l’esprit, tout comme le sang filant librement à travers la veine dédiée… ces folles pensées lui envahissaient l’esprit, insoumises à sa volonté. S’attendant à une réponse verbale de la part d’Edge elle fût, pour la énième fois, abasourdie par sa réaction.
Si sa soif se taisait peu à peu, l’intervention du policier lui coupa toute sensation de faim. Pleins de considération, il releva le menton de la brune, imitant singulièrement son geste ultérieur dans un tout autre registre. Aucune violence, sa tentative pour l’effrayer avait donc fait un bide. Ils se faisaient présentement face, les yeux dans les yeux, et malgré l’incompréhension Ana n’arqua qu’un sourcil alors que le blond ironisait la situation. Il lui exprimait à quel point son essai ne l’avait pas distinctement touché, ou du moins pas de la façon dont Anabeth l’avait escompté. Il lui souriait, fier de son effet, alors que son orgueil à elle était touchée. Malgré l’opposition de la créature à leur rapprochement, Edge n’en démordit pas. Elle s’apprêtait à répondre lorsque le visage de son colocataire se rapprocha dangereusement du sien, mimant un léger mouvement de recul, la vampire revint à sa position initial. Leur souffle s’entremêlait, et bien qu’on eût connu de meilleures position, elle ne sourcilla pas, imperturbable, seule une indicible lueur de défi perçait à travers ses prunelles vertes. Elle n’était pas née de la dernière pluie, et il en fallait d’avantage pour la faire flancher – une potion d’attirance, par exemple. Finalement, après quelques secondes d’intenses échanges visuels, le policier relâcha la pression. Alors ? lui demanda-t-il. Alors, il n’était définitivement pas effrayé par la nature sauvage d’Ana, du moins il en était irrémédiablement attiré. Réprimant un rire, elle se contenta de lui répondre d’un hochement de tête. Une nouvelle fois, le cerbère s’interposa entre deux les adultes, d’une tête grogna en direction d’Edge, et couina, oreilles rabattues, vers Anabeth, la troisième se contenta de suivre le mouvement de la seconde. On pouvait techniquement dire qu’elles étaient jalouses de la proximité qu’avaient partagée les deux, néanmoins, la jeune femme décida d’inverser les rôles. « Je suis tout à fait d’accord. » Elle embrassa les trois petites têtes brunes une par une, récoltant un énième câlin du cerbère et lança un regard amusé au blond : elle le ciblait. Elle aurait ri si elle s’en était senti le courage. « Dis-moi… » Commença-t-elle, reposant son dos contre le coussin couvrant le bras du divan. « Tu les séduits toute de cette manière ? » elle se moquait ouvertement de lui, quitte à le provoquer dans sa démarche, un espiègle sourire se dessina sur ses lèvres, il fallait bien tourner cette situation au dérisoire.

L’indifférence ou plutôt l’imperturbabilité dont la jeune femme faisait preuve énervait pas un peu Edge. Il s’était attendu à autre chose, mais il ne montra pas sa déception ou sa frustration. Après tout, il finirait par lui tirer une réaction plus frappante. Puis, en même temps, il n’avait probablement pas réagi de la manière qu’elle avait imaginé. Allez savoir pourquoi d’ailleurs, il avait senti le danger sur le coup, il aurait probablement eu peur si elle avait poussé le défi un peu plus loin, mais il était plutôt fier de pouvoir lui montrer que non, elle ne l’effrayait. L’attirance qu’il ressentait à son égard avait probablement mis de côté la poussée d’adrénaline. Quoi qu’il en soit, il y avait au moins le cerbère pour réagir davantage et à quelque part, le policier fut bien content de sa réaction. Ce qui ne l’empêcha pas de pousser un peu plus en rapprochant son visage, il aurait pu pousser au maximum en allant regoûter aux lèvres de la jeune femme, mais il ne fit rien si ce n’était que la fixer.
Lorsqu’il brisa finalement le contact, déviant le sujet vers la jalousie que semblait éprouvé leur cerbère, le policier était bien loin de penser qu’elle retournerait ce commentaire contre lui. Ignorant simplement la tête qui grognait contre lui, il regarda alors la demoiselle récolter un énième câlin de la part de la créature alors couvrait encore la bête d’affection. Inconsciemment et surtout bien contre lui, le jeune homme ne put retenir une grimace de jalousie. Il se rattrapa tout de suite après en faisant mine d’admettre sérieusement : « Je dois avouer que je suis jaloux sur ce coup-là, il t’adore alors que moi j’ai seulement droit à une morsure. » Et il mit l’emphase sur ses paroles en ajoutant une moue presque boudeuse. C’était mieux qu’il ait l’air jaloux de l’affection qu’avait le cerbère pour Anabeth plutôt que l’inverse.

Suite à quoi la jeune femme posa une question qui le prit par surprise. Manquant de s’étouffer sur le coup de la surprise, Edge la fixa pour tenter de comprendre son intention. Pour sa part, il n’avait pas envie d’étaler ses techniques de drague, surtout pas devant elle si bien qu’il préféra essayer de plaisanter : « Non, habituellement l’uniforme fait tout le travail. » Après les femmes étaient souvent attirées par une homme en uniforme. Un sourire s’étira sur ses lèvres avant qu’il fasse mine de se rapprocher un peu plus en demandant : « Pourquoi, ça t’intéresse ? » Puis, sans prévenir, il se leva et se dirigea vers la cuisine pour attraper quelque chose à manger pour leur petite bête, c’était, après tout le meilleur moyen d’amadouer la bête. À quelque part, il préférait essayer de s’éloigner d’une discussion qui portait sur ses conquêtes, alors que la demoiselle l’intéressait tout particulièrement. Il tendit la nourriture au cerbère en faisant bien attention à ses doigts. Il n’avait pas besoin de se faire mordre encore une fois. Son regard se porta finalement à nouveau sur la jeune femme et, profitant du fait que la bestiole était occupée, il prit le risque et alla posa ses lèvres sur la joue de la demoiselle avant de dire très sérieusement : « Tu peux dire que c’est spécialement pour tes beaux yeux. » Pour finalement rigoler un peu. Il valait mieux pour lui qu’elle pense qu’il ne jouait qu’un jeu, mais en fait, il était très sérieux. Le policier était aussi très curieux - ou inquiet, de voir la réaction qu’elle aurait.

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Seulement une morsure, ah que c’était hilarant ! A vrai dire, le suçon qu’il portait suffisait amplement, la marque de ses crocs n’auraient été qu’accessoire. Il était vrai qu’Anabeth affectionnait particulièrement la bête, et la couvrait de caresses, bisous, câlins à longueur de temps, cela ne faisait que deux jours mais elle ne pouvait déjà plus se passer du monstre. Edge récoltait les vents glaciaux, les plaisanteries parfois sarcastiques, et… les violentes pulsions d’un vampire anxieux. Maintenant, elle se jouait de lui, et lui, la boudait pour le manque d’affection flagrant qu’elle lui portait. « J’imaginais que tu préférerais. » après tout, il lui avait demandé de la mordre, comme ça, pour prouver qu’il n’avait peur de rien, et surtout pas d’elle. Une noble intention à la base, afin de lui démontrer qu’elle pouvait décemment se fier à lui, néanmoins il lui faudrait plus de preuve pour s’abandonner partiellement au sentiment de confiance.
Ah l’uniforme, fantasme d’une majorité de femmes. Soit, un homme en uniforme avait quelque chose de séduisant, tout comme les femmes, mais elle ne s’attardait pas sur ce genre de détails. Désireux d’apprendre la raison qui avait poussé Anabeh sur ce terrain, alors elle lui répondit le plus simplement du monde. « Simple curiosité. » Un haussement d’épaules accompagna ses paroles, elle ne lui avouait que la simple vérité. Elle ne s’intéressait pas à ses conquêtes, bien qu’il eût dû en compter déjà pas mal à son actif, elle souhaitait simplement le désarçonner, et couper court à la drague. Lorsqu’Edge quitta brusquement sa place, elle le suivit du regard, curieuse. Le martèlement des croquettes dans la gamelle brisa le jeune silence, et sans se faire prier, le cerbère accourut précipitamment afin de se repaitre. La faim lui faisait oublier l’animosité que partageaient les deux mâles.
Les lèvres du garçon claquèrent contre sa joue, y déposant un baiser enfantin. Ana, une fois de plus, ne l’avait pas vu venir, et le trouvait soudainement bien romantique, puis quand il s’installa de nouveau près d’elle. Elle ne pût contenir son exclamation, où sonnait une note sarcastique. « C’est adorable ! ». On était passé du registre sensuel, à celui de mignon en un rien de temps, il devait posséder plus d’une corde à son arc ! Sa mauvaise foi résultait d’une appréhension, elle refusait que l’atmosphère tourne aussi mal que sous leur abri de fortune, certes les circonstances étaient différentes mais elle ne souhaitait pas réitérer l’expérience, du moins pas de sitôt. « Et… c’est de cette manière que tu les mets dans ton lit, n’est-ce pas ? » elle lui posa la question comme on cherche la réponse d’une devinette, impatiente de connaître le résultat. Malgré le ton de plaisanterie, elle se demandait si sa démarche n’était pas trop poussive, peut-être s’était-il vexé. Alors elle se reprit, « Non je plaisante. » en ricanant.

À quelque part, le comportement d’Anabeth était presque blessant, parce qu’elle se jouait de lui et qu’elle était bien la première à le faire. Le fait que le cerbère ait visiblement décidé de le détester n’aidait en rien les bons sentiments du jeune homme, ce qui ne l’empêcha pas plaisanter un peu. Son attitude envers Ana se résumait bien avec le désir de lui montrer qu’elle lui plaisait, ce qu’elle devait vraisemblablement avoir compris, mais aussi qu’elle pouvait lui faire confiance. S’il avait eu à réagir à la découverte de sa nature, il l’aurait fait sur le coup, comme avec son cadet. L’événement concernant Lance n’était clairement le genre de chose qu’il dirait à la jeune femme pour lui prouver qu’elle pouvait lui faire confiance. Il avait plutôt honte du fait qu’il avait tirer sur son propre frère alors il préférait écarter cet acte de ses pensées, au moins pour l’instant. Il arqua légèrement un sourcil en entendant son excuse pour la question qu’elle lui avait posé : la curiosité ? Il ne lui demandait pas ce qu’elle faisait pour séduire les hommes, d’abord parce qu’il avait bien compris qu’elle n’userait pas d’un quelconque stratagème sur lui, mais aussi parce que ça ne l’intéressait pas. Mais bon, si elle était curieuse c’était à elle.

Le sourire du policier disparu rapidement en entendant l’exclamation d’Anabeth. Edge la fixa, sans rien dire de plus et ne sachant surtout pas comment réagir. Il ne cherchait pas à être adorable, mais il ne cherchait définitivement pas ce genre de réaction. Son regard se planta finalement sur un point quelconque de l’appartement évitant volontairement de regarder la jeune femme alors qu’elle en rajoutait une couche. Le ton qu’elle utilisait ou l’affirmation comme quoi elle plaisantait ne suffit pas à lui faire encaisser le commentaire sans conséquence. Quelqu’un d’autre aurait fait le commentaire et il l’aurait probablement pris autrement, mais c’était Anabeth, et si le fait qu’elle ne le connaissait pas suffisamment pour lancer une telle réflexion, prouvait qu’elle ne le pensait peut-être pas, il restait pratiquement blessé par le commentaire. Parce qu’à ce moment là, il n’était pas en train d’essayer de la mettre dans son lit, c’était bien différent de ce qui s’était passé dans leur abri. Peut-être en faisait-il un plat pour rien, mais même si le fait que ce soit elle empirait sa réaction, il n’aimait généralement pas qu’on dise ce genre de commentaire, parce qu’il n’était pas le plus grand des tombeurs, bien au contraire. Retenant un commentaire déplaisant qui brûlait ses lèvres, il se contenta de faire remarquer : « Quelle belle image tu as de moi. » Avant de se lever sans rien ajouter de plus. Il n’était pas du genre à se pousser, mais le fait que la question qu’elle avait posé l’affectait un peu trop à son coup l’énervait. Se dirigeant vers la cuisine, il prit un bol et se versa des céréales sans prendre la peine d’en proposer à la jeune femme, elle se nourrissait de sang, pas d’une quelconque marque de céréales.

Un soupire traversa ses lèvres alors qu’il posait son regard sur la jeune femme pour la première fois depuis le commentaire. Il préféra changer le sujet de conversation si bien qu’il finit par demander : « Quand tu te disais végétarienne, tu voulais dire quoi ? » Oui parce que le concept de végétarianisme vampirique lui échappait vraisemblablement .

Un silence pesant s’immisça subrepticement dans la pièce, seul le ricanant résonnait encore comme un écho lointain. Ses dernières paroles étaient crues, acerbes, inconvenantes même. Elle ne s’était rendue de compte de sa bévue une fois la sentence prononcée, s’était même excusée, mais son comportement s’avérait clairement irrespectueux et cela lui déplaisait tout autant qu’à Edge. Reprenant une position confortable, elle ne dît mot, effrayée à l’idée de commettre une autre bourde. En aucun cas, Anabeth n’avait souhaité le vexer, limiter les contacts physique oui, rendre l’atmosphère moins sérieuse, mais son intention s’était montrée cruelle envers l’aîné des Coal. Le policier sortit le premier du mutisme que les deux adultes s’étaient imposés, néanmoins elle dénota l’austérité de sa réplique. Elle frémit, consciente de l’impact de ses facéties de mauvais goûts. Jamais elle ne se serait imaginée l’atteindre à ce point, elle ne désirait pas le dénigrer, puisque l’opinion qu’elle se faisait de lui était meilleure que d’apparence… Idiote, se réprimanda-t-elle silencieusement.
« Je… » à peine eût elle le temps de souffler sa première syllabe que le policier quitta de nouveau le divan, irrité. Elle avait bien tenté de rattraper sa manche, ou un pan de son pantalon, il fût plus rapide qu’elle – pour une fois, malgré tout elle enchaîna derechef afin de ne pas laisser ses paroles en suspens. « Je suis désolée… je ne voulais pas. C’était déplacé. » La sincérité vibrait à travers chacun de ses mots, tandis qu’elle le suivait des yeux. Après tout, les données qu’elles possédaient sur le blond étaient minces, jamais ils n’avaient eu de discussion sur leurs vies respectives, jamais. Tordant ses lèvres dans une moue septique, elle remarqua l’éternel sourire se peindre de nouveau sur le visage autrement plus sévères l’instant précédent. Le temps d’un clignement de paupières, elle se trouvait déjà adossée au plan de travail, jambes et bras croisées, face au garçon ; de quoi le surprendre. Jetant un coup d’œil au repas, oh combien, équilibré disposé près d’elle, elle grimaça avant de répondre à sa question. « Je ne me nourris pas de sang humain. » La raison pour laquelle ses crocs n’avaient pas tranché sa peau ultérieurement. Le jour auquel Edge se rapportait, il lui avait fallu, elle, fournir une excuse plausible afin de déjouer l’invitation au repas que lui avait faite Edge, et ses lèvres avaient, d’elles-mêmes, proféré cette justification. « C’est aussi la raison pour laquelle je me baladais dans ton jardin quelques mois plus tôt. » Lui avouer la vérité aujourd’hui ne lui demandait pas grand effort, il en savait suffisamment sur sa condition pour lui révéler la raison des incohérences de leurs premières rencontres. « Si j’étais barbouillée de terre et aussi charismatique qu'un buisson défraîchie lorsque tu es passé à la maison, s’en était aussi la cause. » renchérit-elle. Elle pencha la tête sur la gauche, mal à l’aise. « Pas très élégant tout ça, hein. » un sourire maladroit fleurit alors sur ses lèvres.

Si le silence qui s’installait lui pesait à lui aussi, Edge ne chercha pourtant pas à le briser. Il était blessé ou tout au moins vexé par le commentaire qu’elle avait fait et il n’était désormais plus d’humeur à plaisanter pour sauver l’atmosphère. Certes, il l’avait peut-être cherché au final à force de la draguer à moitié en plus de ce qui s’était presque passé dans l’abri, mais tout de même. Son commentaire montra son humeur du moment et sa fuite vers les céréales trahissait le même sentiment. Il ne remarqua pas le geste de la jeune femme, préférant ignorer ce qu’elle faisait pour le coup. Sauf qu’il ne put le faire lorsqu’elle prit la parole, son regard se releva légèrement en sa direction, ne sachant pas trop quoi dire. Il ne put retenir son commentaire, relevant à nouveau une certaine évidence : « De toute évidence, ouais. » Le même ton austère se faisait sentir et sans même connaitre le policier on pouvait voir qu’il était blessé. C’était con en fait, il ne devrait pas se faire atteindre aussi facilement et pourtant c’était ce qui était arrivé. Surpris par l’arrivée soudaine de la demoiselle, Edge la regarda en silence. Pour faire mine que ce ne le dérangeait vraiment plus, il finit par sourire un peu plus avant de finalement ajouter : « Enfin, ce n’est pas grave, tu plaisantais de toute façon. » C’était un peu comme s’il acceptait les excuses de la jeune femme, après tout elle avait été sincère, il l’avait bien senti.

Suite à quoi il détourna la conversation sur la condition vampirique de la jeune femme, en l'occurrence son prétendu végétarianisme. S’il avait appris qu’elle lui avait menti lors du merveilleux souper surprise, il se demandait si ça ne voulait pas dire autre chose pour elle, que simplement végétarienne aux termes humains de la chose. Effectivement, il devait avoir bien vu puisqu’elle lui confirma que pour elle végétarienne égalait à ne pas se nourrir de sang humain. Voilà qui enlevait la petite parcelle de crainte qui aurait pu rester chez lui. Après quoi, elle lui avoua que c’était la raison derrière sa présence dans son jardin, ainsi que son apparence lors de la visite surprise chez Yanna. Le souvenir de la dite visite le fit baisser les yeux vers son bol de céréales. Le commentaire qu’elle ajouta lui arracha un sourire franc et il ne put s’empêcher de lui assurer : « Ne t’en fais pas, j’ai vu bien pire. » La gente féminine d’Asaviks étant assez surprenante, c’était le moins qu’on puisse dire et dans le genre pas très élégant il n’y avait rien qui ne battrait l’image de son cadet transformer en loup-garou. Chassant cette pensée de son esprit, Edge finit par ajouter, mine qu’il s’était rétabli après le commentaire déplaisant de la jeune femme : « Puis de toute façon, je te l’ai dit, même en étant déguisée en gazon vaseux, t’es plutôt attirante, on s’en fiche de l’élégance. » Regrettant le commentaire aussitôt qu’il sortit de ses lèvres, il se concentra rapidement sur son bol de céréales sans poser son regard sur elle de nouveau. Il préféra changer de sujet rapidement, posant la question qui lui brûlait les lèvres depuis qu’il avait su sa condition : « Mais en fait... au risque d’être déplacé... t’as quel âge ? » C’était déplacé, on ne demander pas l’âge d’une femme, mais bon. Il s’empressa donc d’ajouter : « Tu n’es pas obligée de répondre, c’est juste que vu que la jeunesse éternelle c’est votre truc, j’imagine que je peux pas me fier sur ton apparence. » La curiosité était probablement un vilain défaut le concernant.

Visiblement les excuses d’Anabeth ne l’avaient pas touché autant qu’elle ne l’aurait escompté. Tant pis, pensa-t-elle, il finirait bien par avaler la pilule, ils leur restaient trois semaines de colocation à partager pour ça. Puis ils s’étaient faufilé sur une voie différente, Ana répondait à sa question, lui révélant la vérité sur leurs rencontres précédent leur lugubre épopée au sein du bois d’Asaviks. Oh, elle ne s’imaginait pas le choquer, il ne s’agissait aucunement de lourds secrets ; non cela elle les préserverait jusqu’à la rédemption. Toutefois, Edge admît qu’il n’était pas le cas le plus délicat de sa maigre carrière, renchérit derechef sur le physique attrayant de la demoiselle : peu importe son aspect, elle demeurait désirable. Eternel gentleman, les mots lui avaient échappé par mégarde probablement, pour cette raison elle ne répondit pas, mais un petit sourire attendri habilla sa bouche.
Détournant finalement son regard en direction du garçon, elle lui demanda « Je peux goûter ? » ne lui octroyant aucun temps de réaction, Anabeth soulagea Edge de sa cuillère et fourra l’ustensile prestement dans sa bouche. Les céréales craquaient sous sa dent, mais une expression perplexe se dessina sur son joli minois : le goût était similaire à du carton. La texture rendait le tout plus attrayant, pas assez pour lui faire oublier l’horrible saveur. Une moue blasée lui rembrunit les traies de son visage tandis qu’elle s’empressait d’avaler les restes de la bouchée. Jamais plus l’envie ne lui prendrait de tester ce genre de nourriture. Edge s’enquérait dorénavant de son âge, elle balança sa terre en arrière, un rire gracieux s’extrayait alors de sa gorge. Son âge elle s’en moquait comme de sa première chemise, les vampires s’aguerrissaient avec le temps, l’âge les affinaient – dépendant du cas, augmentaient l’acuité de leur sens, et leur puissance suivait le pas, car contrairement aux êtres humains, la vieillesse était un atout indéniable. Son sourire amusé prouvait que la question du garçon ne la dérangeait aucunement. « Je ne sais pas, devine. » elle se voulait taquine, comme cela paraissait dans sa voix, et le regard espiègle qu’elle lui lançait. « J’ai peut-être pris des rides avec le temps, je ne m’en suis pas rendue compte. » Accompagnant d’un geste sa parole, elle examina ses propres joues, puis effleura du bout des doigts la peau de son front légèrement plissée pour l’occasion. Pas une trace de vieillesse apparente. « Bien, les jeux sont ouverts. Si tu te trompes trois fois d’affilés, tu… » elle jeta un coup d’œil circulaire dans l’appartement, à la recherche d’une quelconque aide alentours, à l’affût du moindre murmure inespérée d’un des appareils environnant, comme si le mixeur ou le bol allaient lui souffler l’idée du siècle. Une bouteille de whisky irlandais, lui faisait de l’œil discrètement depuis tantôt, et prise à court d’idée, abdiqua. « Tu devras avaler cul sec un shot de whisky. » s’exclama-t-elle, fière de sa trouvaille. Se décollant du plan de travail, elle agrippa délicatement la bouteille et fouina à travers les différents placards avant de dénicher deux verres à liqueur, puis disposa le tout près de la rose gentiment offerte par Edge. « Paré ? »

Se réprimant mentalement suite au commentaire qui lui avait échappé, Edge se dit qu’il devrait apprendre à ne pas tout dire ce qui lui passait par la tête. Au moins, elle ne releva pas le commentaire et il lui en fut reconnaissant sans pour autant s’attarder davantage sur le sujet. Il valait mieux changer la donne sinon elle pourrait sans doute se permettre de lui faire un autre commentaire et il l’aurait peut-être bien mérité cette fois à force de lui faire ce genre de commentaire. Les yeux braqués sur son bol de céréales, il ne vit pas le sourire attendrit sur le visage de la demoiselle. Il en capta néanmoins la fin du sourire lorsqu’il releva la tête en entendant la voix d’Anabeth. Si elle pouvait goûter ? Un peu surpris par le fait qu’elle n’y avait gouté auparavant, ce que toute personne devrait normalement avoir fait, il s’apprêtait à aller lui prendre une cuiller dans un tiroir lorsqu’elle lui prit la sienne. Voyant qu’elle ne semblait visiblement pas dérangée par l’idée de partager les ustensiles, il dit, un peu à retardement : « Vas-y sers toi... » Après tout, il était un peu tard pour s’opposer à ce qu’elle le fasse et il s’en fichait bien, même si c’était dommage qu’elle n’aime pas ça ! En récupérant sa cuillère, il s’enquit alors sur l’âge de la jeune femme. De toute évidence, sa question ne la dérangeait pas puisqu’elle commença à rire. Un sourire fleurit sur ses lèvres alors qu’il la regardait tendrement. Il finit néanmoins par baisser le regard vers le cerbère qui avait présentement fini de manger. Faisant preuve d’une bonne foi envers la bestiole même s’ils ne s’aimaient vraisemblablement pas beaucoup, le policier alla chercher une des peluches pour la tendre au cerbère.

« Je ne sais pas, devine. » Son regard passa rapidement du petit animal à la jeune femme alors qu’elle renchérissait sur la possibilité de rides. Bien sur, il savait qu’elle plaisantait et il décida de renchérir sur le commentaire : « Peut-être oui, tu dois te faire vieille après tout. » Un sourire moqueur trahissait la plaisanterie qu’il avait pourtant dit avec un certain sérieux. S’il n’avait pas su qu’elle était un vampire, Edge n’aurait probablement jamais pensé qu’elle dépassait la mi-vingtaine, sauf que puisqu’elle plaisantait sur son âge, il ne pouvait que penser qu’elle était plus vieille que ça. Alors qu’elle continuait sur l’idée qu’il devait devait deviner son âge, il attendit tout simplement la conséquence qu’il y aurait sans rien dire de plus. Elle tomba rapidement d’ailleurs : un shot de whisky... Le jeune homme la regarda sortir tout le nécessaire. Il supportait plus ou moins bien l’alcool, surtout pas s’il devait rapidement enfiler des shots de whisky, mais avec de la chance, il tomberait rapidement sur le bon âge. Lorsque Anabeth lui demanda s’il était paré, le policier hocha la tête avant de commencer : « Hmm... trente ans ? » C’était probablement loin du compte et elle confirma ce fait. Un de trois. Il chercha dans le peu de fois où ils s’étaient parlé un indice qui pourrait l’aider dans sa devinette. « Quarante-trois ans ? » Encore une fois, il se doutait presque ce ne devait pas être le compte, mais il ne pouvait pas la rendre trop vieille, ce serait déplacer. Effectivement, il se trompait à nouveau, deux essais sur trois. Finalement, histoire de jauger les réactions de la jeune femme, Edge finit par plaisanter en proposant : « Quatre cents ans ? » Devinant que ce n’était pas non plus le compte, il se versa lui-même le whisky avant de le vider cul sec. Suite à quoi il demanda : « Tu comptes boire avec moi ou... ? » Bah oui, elle avait sorti deux verres après tout.

Tout ce que désirait Anabeth était d’agrémenter l’atmosphère d’un peu de folie. Elle avait proposé le jeu sur un coup de tête, détendre le fil de leur conversation, oublier sa bourde lui semblait indispensable, et rendre la découverte de son âge ludique, qui plus est l’ambiance était bien trop calme à son goût. Installée près du comptoir, ses mains soutenaient son visage alors qu’elle observait la réaction du blond face au défi qu’elle lui lançait. Apparemment intéressé par la proposition qu’elle venait de lui faire, il avait commencé les enchères. Par pur galanterie, elle le savait, il avait débuté doucement, ne lui proposant que des âges relativement jeunes. « Glacial. » dit-elle en grimaçant, « Ah non ! » sans sourciller davantage « Pas celui-là non plus. » renchérit-elle, au vue de ses trois premiers échecs, Edge se servit lui-même la dose de whisky avant de se l’enfiler derechef. Elle appréciait tout particulièrement que le policier se prenne aussi simplement au jeu, il avait accepté sans rechigner sa proposition, et se distribuait son propre gage : quelle dévotion ! Probablement intrigué par la présence incongrue d’un second verre, Edge s’enquit de la participation de la belle. « Je ne sais pas encore. » lui avoua-t-elle avant de repartir sur les chapeaux de roues ! S’en suivit une avalanche de chiffres au hasard, et chaque fin de trio inexacte comportait la punition aussitôt ingurgitée. Une fois, puis deux, puis une troisième. Jamais son sourire ne la quittait, un rire éclatait parfois, elle s’amusait tout simplement, sans jamais prendre part à l’alcool ! Une autre suite de nombre à laquelle elle secoua vivement la tête en guise de réponse, retroussant son nez dans une moue adorable. « Encore un ! » s’exclama-t-elle tandis qu’elle versait la dose du liquide ambrée au pauvre garçon qui avait d’ores et déjà dû siroter les quatre premiers shots, « Santé ! » son verre vide trinqua son jumeau gorgé. « Je vois que tu as un peu de mal alors… mon âge termine par le chiffre six. » lui intimant cela, elle planta ses prunelles vertes dans celles du garçon déjà enivré ; « Pour la peine, ça te fera deux verres pour tes prochaines erreurs ! » un subtil sourire aux lèvres, bouteille en main elle déversait son contenu, puis elle avança le shot au même niveau que son confrère du bout des doigts.
De l’autre côté se trouvait le cerbère reniflant timidement la peluche, repoussant du bout de sa seconde truffe avant l’attraper et s’allonger au pied d’Anabeth, la tête couchée sur le jouait, il observait la scène attentif.

Moore Anabeth a effectué 1 lancé(s) d'un 3 :

Les essais d’Edge pour deviner l’âge d’Anabeth étaient probablement loin du compte, mais il n’avait pas tellement d’indices pour le deviner facilement. Quoi qu’il en soit, il se pliait au jeu, enchainant les shots de whisky sans trop broncher. Il ne savait même pas si la demoiselle se joindrait à lui pour boire un peu, mais bon il relèverait le défi tout de même, espérant ne pas trop manquer le tir. Ce qui était probablement peine perdue puisqu’il n’avait aucune idée d’âge approximatif. D’autant plus que malgré son physique assez baraqué qui lui assurait une certaine résistance à l’alcool, il commençait à ressentir les effets des verres qu’il avait bu. Le nombre était déjà un peu nébuleux, le jeune homme étant trop concentré sur l’âge de la demoiselle pour y prêter vraiment attention. C’était peut-être une bien vilaine idée puisque les effets ne tarderaient pas à être plus présents s’il continuait comme ça. Ce qui n’empêcha pas le jeune homme de donner trois autres autres nombres au hasard. Il n’avait aucune idée de s’il s’approchait ou non du nombre qu’il cherchait, mais en voyant le doux liquide se faire verser dans son verre, Edge ne put s’empêcher de sourire. Après tout, pour l’instant, l’alcool ne faisait que le rendre un peu plus guilleret que d’habitude, ce n’était rien de bien méchant.
L’indice de la jeune femme l’encouragea dans l’idée de trouver le nombre. Après tout, il ne lui restait qu’à trouver le nombre, ou les deux nombres plutôt, qui lui manquait pour faire l’âge d’Anabeth, une tâche qu’il pouvait très bien réussir sans trop de problème. Sauf que le prix de l’indice vint rapidement alors qu’elle lui indiquait qu’il devrait maintenant boire deux shooters au lieu d’un seul. Toujours avec un sourire, il acquiesça à la conséquence avant de dire : « Très bien alors. » pour ensuite cogner son shot contre celui maintenant rempli de la demoiselle en ajoutant : « Santé. » Avant de boire avidement le contenu de son verre. À vrai dire, toute la pression des derniers jours, la découverte de la condition de la jeune femme, les restes de ses blessures qui lui faisait un peu mal lorsqu’il dormait, tous ses petites problèmes paraissaient moins importants ce qui n’empêchait pas un certain sérieux de s’installer chez Edge. Conséquence de l’alcool qui commençait à faire ressentir ses effets plus fortement. Les trois prochains chiffres sortir naturellement des lèvres du jeune homme avant qu’il ne s’arrête, une mine pensive sur le visage. « Attends je crois que je l’avais déjà dit celui là... » C’était probablement le cas. « alors hum.. cent vingt-six ans ? » ajouta-il comme dernier essai. Toujours faux, si bien qu’il prit la bouteille des mains de la jeune femme pour remplir les deux shots avant de se les enfiler l’un après l’autre. Certes un des verres était celui d’Ana, mais ce n’était plus tellement la priorité du jeune homme.
Non les sept shots qu’il avait pris faisaient leur effet, si bien qu’Edge devenait plus émotif qu’à la normale. C’était probablement une bien bonne chose. Effectivement, il était maintenant bien concentré à regarder la demoiselle avec tendresse avant de dire, un peu trop sérieusement : « Tu sais je suis content d’avoir fait ce truc avec toi. » - par truc, il voulait bien sur parler de la chasse aux cocos, s’assurant qu’elle comprenait bien cela il continua : « Je sais que tu m’aimes pas beaucoup mais... » Sa voix se perdit comme s'il n'arrivait pas totalement à contenir ses émotions. Un jour elle regretterait vraiment d’avoir eu la brillante idée de le faire boire. Changeant complètement de sujet, le policier s’empressa de continuer le jeu en disant trois autres nombres, tous erronés. Sans se soucier des conséquences, il remplit et vida rapidement les deux verres. Edge était définitivement à sa limite, c’était maintenant à Anabeth de l’arrêter.

La bouteille perdait graduellement sa réserve de whisky, le liquide avoisinait le goulot vingt minutes plus tôt, maintenant le reste flirtait dangereusement avec le cul du futur cadavre. Edge se prenait cordialement au jeu, puis amplifiait sa coopération au fur et à mesure, à n’en pas déplaire à Anabeth. Les shots s’enfilaient tour à tour, tout comme les mauvaises réponses à sa devinette décidément farouche. Elle secouait parfois la tête, retroussait le bout de son nez, ou répondait juste : non. Présentement le divertissement se déroulait agréablement, les deux adultes en profitaient sans se prendre la tête. Le blond portait son sempiternel sourire, assurément engendrait par les premières goulées de la fameuse liqueur. Ana, quant à elle, se félicitait d’avoir allégé le climat appesanti par ses soins. Accentuant le défi en rajoutant une dose de whisky, Ana se frottait déjà les mains tandis qu’Edge ne rechigna aucunement cet ajout, bien au contraire il se montra tout aussi productif. Derechef, il enchaîna aléatoirement une nouvelle liste de nombres, sans grand succès, non à vrai dire, sa mémoire lui jouait même des tours, toutefois ses réponses se rapprochaient graduellement de la solution. « Alors hum.. cent vingt-six ans ? » pour la énième fois, Edge essuya un échec, et sans se prier se resservit deux verres avant de les expédier directement entre ses lèvres.
Trop bien informée sur les risques d’une consommation trop massive d’alcool, la vampire observait le policier flancher sous les effets désinhibiteurs que l’emprise de ce mal lui provoquait. Il lui avouait le plaisir qu’il avait éprouvé à faire ce truc en sa compagnie, son sourcil s’arqua au même instant, il ne parlait vraisemblablement pas du jeu actuel vu le tendre regard avec lequel il la fixait. Il lui fît finalement part de l’impression négative que semblait avoir la vampire à son égard, à ces mots le regard vert se détourna vers le cerbère, contrit. La bête réagissant à sa maitresse, vint se coller à elle, dans le seul but de la consoler. Incapable de s’expliquer, elle se tût bien malgré elle. Certainement aussi peu enclin à s’embarquer sur des terrains glissants qu’Anabeth, et ce malgré son taux d’alcoolémie élevé, Edge s’insurgea de reprendre le fil du jeu en jetant trois autres nombres au hasard, tous erronés. N’ayant pas le réflexe de lui retirer ses verres avant, il les ingurgita prestement. « Bon je pense qu’on a assez joué pour le moment. » trancha-t-elle en cachant la bouteille dans un coin de la cuisine, avant de revenir sur le jeune homme au regard étrangement triste. Triturant sa lèvre inférieure, elle regrettait de l’avoir poussé à s’enivrer autant, et d’avoir involontairement omis les dégâts ; maintenant les dés étaient jetés et la suite ne présageait rien de bon. « Je crois qu’il est l’heure de dormir. » le ton de sa voix s’était voulu autoritaire, sa culpabilité trahissait néanmoins ses intentions, elle refusait qu’il se mette en fâcheuse position parce qu’elle n’avait pas su stopper sa descente. Postée au côté du saoul, elle voulait s’assurer qu’il serait capable d’accéder à sa chambre sans la moindre embûche, vu les réflexes de mammouth que les gens ivres possédaient. Puis les paroles chagrinée d’Edge lui revinrent à l’esprit : je sais que tu ne m’aimes pas beaucoup. S’éclaircissant la voix, elle débuta sa phrase avec rudesse, mal assurée, « Sache que… sache que je ne te déteste pas. » son timbre s’adoucissait au rythme des syllabes, lui confessant implicitement qu’elle éprouvait une certaine sympathie envers lui, une affection particulière qu’elle préférait taire pour le moment.

S’il y avait bel et bien une chose qu’il fallait savoir c’était bien que les commentaires du genre risquaient de commencer à pleuvoir si Edge n’arrêtait pas de boire. Bien inconscient de la réaction de la jeune femme, le policier préféra passer du coq à l’âne pour retourner vers la devinette sur l’âge de la jeune femme. C’était un terrain moins dangereux, à croire qu’il y avait encore une minime partie de sa personne qui n’était pas totalement assommée par la quantité d’alcool qu’il avait ingurgité. Quoi qu’il en soit, ce quelconque reste de lucidité ne risquait pas d’avoir tenu après les deux autres shots qu’il cala rapidement. Heureusement pour lui, ainsi que pour la demoiselle, Anabeth décida de mettre fin au jeu, ce qu’il n’accueillit pas avec une très grand chose. Après tout, malgré le surplus d’émotions et l’accentuation de l’impression que le jeune femme ne l’appréciait pas, Edge s’amusait plutôt bien. « Mais pourquoi ! » demanda-t-il sans vraiment attendre la réponse à sa question. Il voulait simplement montrer son désaccord, il pouvait toujours espérer que ça changerait quelque chose.

Cela dit, il était loin d’être en état de s’opposer à la décision de la jeune femme. Heureusement pour tout le monde, surtout pour sa propre personne, il se retrouvait à être un peu plus docile sous les effets de l’alcool. Si bien que malgré une moue boudeuse digne d’un gamin de cinq ans, probablement la même qu’il faisait à sa mère lorsqu’elle lui disait de rentrer, Edge ne s’opposa pas non plus à la nouvelle décision qui était d’aller au lit. De toute façon, c’était évident que la fatigue se faisait sentir en même temps que les effets de l’alcool, il avait beau avoir décidé de rester éveiller pour porter compagnie à Anabeth ou encore pour s’occuper du cerbère, il avait tout de même travaillé toute la journée. Même lorsqu’Ana se posta près de lui, Edge fit bien attention de ne pas chercher son aide d’une quelconque manière qui soit. Il avait beau avoir la démarche de quelqu’un qui avait bu ce qu’il avait bu, il était hors de question qu’il s’appuie sur elle, sa fierté en prendrait un coup et elle était déjà assez atteinte comme ça. Lorsqu’elle prit la parole, le policier se tourna vers elle, l’air intéressé. Elle choisissait bien son moment pour lui confesser un minimum d’affection, il n’y avait que très peu de chance qu’il se souvienne le lendemain. Cela dit, les mots de la demoiselle eurent un effet immédiat chez lui et un vrai sourire s’étira sur ses lèvres. Il était vraiment content de le savoir, mais il ne dit rien, ne trouvant pas dans son esprit confus les bons mots pour répondre à la demoiselle.

Après quelques minutes, quelques chutes évitées de peu et probablement un ou deux jurons, Edge atteignit sa chambre et se laissa tout simplement tomber sur son lit. Aucune chance qu’il ne prenne le temps de se changer. Sa tête reposait maintenant sur l’oreiller et vraisemblablement il risquait de s’endormir sous peu. Pourtant, sa main attrapa celle de la demoiselle alors qu’il demandait : « Reste... » Ce n’était pas une invitation à quoi que ce soit, il voulait seulement profiter de sa présence, qu’elle soit là. Son esprit était toujours aussi confus puisqu’il commença ensuite à confier quelque chose à la jeune femme : « Tu sais... je te ferai jamais de mal... pas comme à Lance... » À croire que ce qu’il avait fait à son frère le hantait toujours, même si c’était pour se défendre. Cela dit, il ne s’étendit pas dans les explications et chercha plutôt les bras de Morphée à la suite d’une telle déclaration, ne gardant simplement sa main dans celle d’Anabeth.

Apparemment contrarié à l’idée de stopper leur jeu, Edge fît part de son désaccord, sans pour autant imposer son refus au vampire. L’instant suivant, il lui était même conseillé de se rendre au lit, elle s’était d’ailleurs présenté à ses côtés afin de lui venir en aide au cas où. Clairement frustré à l’idée qu’Anabeth puisse lui servir de déambulateur, le garçon avait débuté sa marche incertaine vers sa chambre. Elle fût étonnée de sa réaction lorsqu’elle lui avoua qu’elle ne le détestait pas, un sourire plus éclatant que jamais lui étira le bout des lèvres, inconsciente que ses mots avaient le pouvoir de le toucher si sincèrement. Néanmoins, les deux adultes ne pipèrent mot.
Elle le suivait de près, prête à intervenir au moindre instant, lui titubant à moitié il n’était pas censé de le laisser traverser les quelques mètres qui le séparait de son lit tout seul. Plusieurs fois elle avait tendu la main dans l’espoir de lui éviter la chute, il s’était miraculeusement rattrapé à chaque coup et avait terminé sa course en s’étalant de tout son long sur le matelas. A deux pas de lui, Anabeth pensait quitter la pièce lorsque la main du saoul agrippa prestement la sienne, elle fût tout d’abord surprise par la requête que adressait Edge. Rester, l’alcool lui faisait décidément bien trop tourner la tête, il lui était impensable de jouer les « mamans » à l’heure d’aujourd’hui. De nouveau, une suite de mots s’échappa d’entre les lèvres du garçon, celle-ci l’impliquait elle et… le jeune Coal, Lance. Prise au dépourvu, elle afficha une mine troublée, de quoi pouvait-il bien lui parler ? Roidie à ses côtés, elle ne comprenait la totalité du sens de ses mots. Malheureusement, et malgré la demande touchante d’Edge, il était temps pour elle de le laisser se reposer. « Je suis désolée... » souffla-t-elle navrée, alors qu’il s’était d’ores et déjà abandonné au néant. Reposant avec douceur la main dorénavant ballante du garçon sur le rebord du matelas, elle déposa du bout des lèvres un baiser sur le front de l’endormi puis s’éloigna une fois pour toute des lieux. Une bonne inspiration d’air lui emplit les poumons, avant de relâcher ses émotions par une expiration énergique. Sitôt fait, elle trottina vers le cerbère, lui intimant qu’il était temps pour eux de prendre un bon bol d’air frais. La bête remua automatiquement sa queue, emballée à l’idée de faire un tour. Enfilant en vitesse sa veste en cuir et ses bottes encore souillées de leur dernière aventure, elle abandonna l’appartement le temps d’une longue promenade l’esprit un brin tourmenté par les propos assommés du blond.

Moore Anabeth a effectué 1 lancé(s) d'un 3 :